
Psychosociologue, théoricien de l’apprentissage organisationnel, de la recherche-action et de l’intervention
De la psychologie organisationnelle…
Après des études supérieures à Worcester (Massachusetts) puis à l’université du Kansas, Chris Argyris travaille avec William Foote Whyte. C’est sous sa direction qu’il réalise une première recherche, à savoir l’observation du style managérial d’un dirigeant d’entreprise, travail qui fournira les données pour un doctorat et un premier livre, Executive Leadership.
Fortement lié au groupe fondé par Kurt Lewin et dirigé ensuite par Douglas McGregor au Massachusetts Institute of Technology (MIT), C. Argyris a été une des figures de proue de la psychologie organisationnelle à orientation interventionniste et managériale des années 1960. Sur la base d’une réflexion sur le développement des besoins psychologiques des individus (de sécurité, de reconnaissance sociale, mais aussi d’accomplissement de soi), ce courant de l’analyse organisationnelle diagnostiquait les tensions croissantes entre ces besoins et les exigences et la logique de fonctionnement des organisations (tayloriennes) de l’époque. Le problème devenait alors de développer une théorie des organisations qui tout à la fois permette de penser cette tension et apporte les instruments pour intervenir dans les organisations. Ces instruments devaient permettre d’agir en leur sein avec un double but : sur le plan des personnes — et notamment des dirigeants — clarifier et développer ces besoins ; sur le plan de l’organisation, réformer les structures et le fonctionnement afin de les rendre compatibles avec les besoins des individus. Parmi les nombreuses publications de l’époque, le livre de C. Argyris, paru en 1964, Integrating the Individual and the Organization, fut un des livres les plus représentatifs des réflexions de ce courant.
… à la théorie de l’apprentissage organisationnel
C. Argyris représente, encore maintenant, le versant psychologique et psychosociologique de la théorie des organisations, mais devant l’essoufflement progressif de la psychologie organisationnelle, il a changé de raisonnement et d’analyse. Aujourd’hui, ce professeur émérite est connu, avant tout, pour sa « théorie de l’apprentissage organisationnel » et pour sa méthode d’intervention, développées en collaboration avec Donald Schön au cours des trente dernières années. Pour lui, les capacités d’apprentissage d’une organisation constituent son capital le plus important. Et ce capital dépend, notamment, de la manière dont les membres d’une organisation réussissent à surmonter l’écart entre ce qu’il appelle les « théories professées » (la « langue de bois », la réalité formelle, les « mensonges officiels ») et les « théories réellement mises en pratique » telles qu’elles s’expriment en creux dans leurs pratiques. Plus cet écart est grand, moins bonne sera la connaissance que l’organisation aura de ses pratiques véritables, et moins elle sera capable d’apprendre de ses erreurs. Le but d’une intervention doit donc être de recréer une culture dans l’organisation qui permette aux individus de mieux gérer leurs relations interpersonnelles et de construire une communication vraie, en partant de pratiques réellement mises en œuvre pour améliorer les capacités d’apprentissage. Très influencé par l’approche et les enseignements de K. Lewin, C. Argyris est un pourfendeur éloquent de ce qu’il appelle la « recherche descriptive ». Pour lui, une recherche qui ne sert pas à l’action, qui s’arrête à la description, sans donner les moyens de changer les pratiques décrites, est, au mieux, incomplète ou, au pire, dangereuse. Pour C. Argyris, une théorie doit être utile, c’est-à-dire testable dans et par l’action : la recherche doit être une recherche-action.
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